elie bouisson

Creuser la terre, pétrir l’argile, tailler la pierre. En quête
des instincts les plus primitifs que l’Homme entretient avec
la matière, Elie Bouisson questionne non seulement la forme
mais le processus gestuel qui lui donne vie. Agissant dans
l’action et par introspection, l’artiste vient déconstruire notre
notion de l’objet pour rendre visible cette « radicalité du geste
» à jamais réversible que l’on appose sur la matière. Cette
excitation palpable qu’il exprime lorsque l’artiste parle de son
travail est liée à cette illusion du contrôle et de la maîtrise.
C’est la matière qui impose ses contraintes au créateur
et c’est ici que Elie Bouisson va tester les limites de cette
dernière mais aussi de son propre corps. Ce corps qu’il utilise
comme « comme terrain d’expérimentation, comme atelier
de fabrication ». Telle une recherche archéologique à travers
l’intuition du geste, l’artiste vient travailler des matériaux tels
que la cire ou le plâtre, dans un « processus simple et direct »
sans l’intellectualisation. La technique s’invente au moment
même où le corps agit dans un mouvement de répétition, un
empirisme radical qu’il définit comme un « travail à l’aveugle
». Dans cette marche solitaire, le geste présent se fait l’écho
du précédent, pour devenir rythme et bientôt « chorégraphie
». Ainsi l’œuvre qui en résulte échappe à l’artiste et l’objet «
se suffit à lui-même ». Elie Bouisson aime à être le « premier
spectateur » de son œuvre, qu’elle existe en dehors de lui.
Afin que l’autre puisse à son tour s’y infiltrer, l’appréhender
instinctivement. L’explication vient après. L’objet doit d’abord
être ressenti, il doit provoquer un émoi et faire ressurgir ses
sensations vécues pendant l’acte de fabrication. Ces objets
parlent d’abord de la « sensibilité propre aux matériaux » dont
ils sont composés et de l’action qui vient les transformer. Il
dévoile les infinies possibilités enfouies dans la matière car «
elle a un pouvoir en soi » qu’il tente ici de révéler.

 

Par le Collectif Embrayage